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Réinventer l’École par le temps : mes 10 propositions

Une démarche de long terme 

Depuis plusieurs mois, dans le cadre de la démarche Le Sursaut, j'ai engagé une réflexion collective autour d’un enjeu aussi discret qu’essentiel : les rythmes scolaires. Ce chantier, souvent relégué au second plan, touche pourtant au cœur de notre École : l’organisation du temps de l’enfant. Lors du colloque organisé à l’Assemblée nationale, nous avons confronté les points de vue de chercheurs, d’élus, de professionnels de terrain et de représentants des parents. Tous ont exprimé une même urgence : remettre le temps de l’enfant au centre de nos priorités éducatives. Cette mobilisation a donné lieu à une série de propositions concrètes, nées de la convergence entre science, expérience de terrain et volonté politique. 

Ce document a également été transmis à la Convention citoyenne sur les temps de l'enfant, organisée sur proposition du président de la République. 

Rythmes scolaires : un constat clair, des enjeux décisifs 

Aujourd’hui, notre organisation scolaire est marquée par un désajustement profond : journées trop longues, semaines déséquilibrées, emplois du temps rigides. Une architecture temporelle pensée à hauteur d’adulte, souvent au détriment des besoins des enfants. Ce désalignement entre temps scolaire, familial, périscolaire ou numérique nuit à la concentration, à la santé mentale et à l’épanouissement des élèves. Les sciences cognitives, la chronobiologie et les comparaisons internationales convergent : d’autres modèles sont possibles. En Finlande, à l’AEFE ou encore à Dijon, des expérimentations ont déjà montré que sobriété, souplesse et stabilité peuvent aller de pair avec excellence éducative. Le temps n’est pas une contrainte : il est une ressource. Encore faut-il le penser, le partager et l’adapter. 



Dix propositions pour réinventer l’École par le temps

1. Accroître l’autonomie locale dans l’organisation des rythmes : donner aux établissements et aux collectivités les moyens d’adapter les horaires et les séquences à leurs réalités, dans un cadre national lisible et cohérent.

2. Réserver les matinées aux apprentissages fondamentaux : organiser les enseignements clés lorsque les capacités d’attention sont maximales, et consacrer les après-midis à d’autres dimensions : créativité, sport, citoyenneté, vie collective, orientation dès le collège. Le soutien scolaire peut y trouver sa place également.

3. Réduire la longueur des journées sans diminuer le volume d’enseignement : alléger le quotidien scolaire sans rogner sur les apprentissages, en repensant l’organisation du temps plutôt qu’en augmentant la charge horaire, ce qui demandera un ajustement du calendrier des vacances dans le second degré.

4. Débuter les cours à 9h à partir du collège : mieux respecter les rythmes biologiques des adolescents pour améliorer leur bien-être, leur motivation et leurs résultats.

5. Maintenir des temps de repos structurés tout au long de la maternelle : proposer des temps calmes ou de sieste adaptés aux besoins individuels jusqu’en grande section : un facteur clé de bien-être et de disponibilité cognitive.

6. Utiliser pleinement l’année scolaire : redonner tout son sens au calendrier scolaire en assurant des apprentissages effectifs jusqu’à la fin de l’année, pour éviter la déperdition progressive constatée dès le printemps.

7. Lancer un plan national de formation sur les rythmes de l’enfant : former tous les acteurs, enseignants, ATSEM, animateurs, aux connaissances scientifiques liées au développement, au sommeil, à l’attention, pour faire évoluer les pratiques de manière concertée.

8. Élaborer une charte locale des temps éducatifs dans chaque école : construite avec les équipes éducatives, les familles, les élus et les enfants, elle permettra une appropriation partagée et une organisation du temps adaptée au contexte local. Ce document vivant, précisant l'organisation des journées (apprentissage, repos, périscolaire) revu chaque année, servirait de pacte local assurant continuité, lisibilité et équité pour tous.

9. Mieux intégrer les personnels périscolaires à la communauté éducative : reconnaître pleinement leur rôle dans le temps global de l’enfant, à travers des temps de coordination, des formations partagées, et une place dans le projet d’école.

10. Évaluer les effets sur le bien-être et les apprentissages et impliquer les élèves : développer les innovations en associant les chercheurs aux équipes éducatives et aux collectivités pour mesurer l’impact des nouveaux rythmes, et donner aux élèves un espace de parole sur leur quotidien scolaire.