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Mon intervention sur les bourses scolaires à l'étranger

Dans le cadre des Assises de la Protection Sociale des Français de l’étranger, organisées de mars à octobre 2025 à l’initiative de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), j’ai été invité à prendre la parole sur la priorité des bourses scolaires, l’un des trois axes majeurs de ces Assises. 

  • Ces Assises, établies à la demande du Gouvernement et pilotées par l’AFE, visent à repenser les dispositifs de protection sociale destinés aux trois millions de Français résidant hors de France. Elles s’attachent particulièrement aux bourses scolaires, aux aides sociales et à l’avenir de la CFE. 


Mon intervention lors de la table ronde sur les bourses scolaires :

Mesdames, Messieurs, 

Je tiens d’abord à remercier l’Assemblée des Français de l’étranger ainsi que le Gouvernement d’avoir permis l’organisation de ces Assises pour la protection sociale de nos compatriotes établis hors de France. 

Ces Assises arrivent à un moment crucial : d’une part, la situation de nos communautés françaises à l’étranger a profondément évolué ces dernières années, j’en avais d’ailleurs fait part au Premier ministre dès 2018 dans mon rapport sur la mobilité internationale. 

D’autre part, nous faisons face aujourd’hui à des contraintes budgétaires majeures, fruit de décennies de décisions différées. Le mur de la dette et des dépenses publiques est là, et dans ce contexte, nous aurons à défendre chaque euro destiné à nos compatriotes à l’étranger dès lors qu’il est utile, efficace et équitable. C’est notre responsabilité collective. 

Dans ce cadre, je souhaite ici me concentrer sur l’un des 3 priorités des Assises à savoir notre système de bourses scolaires. Celui-ci est un pilier important de notre politique éducative à l’étranger. Il permet à des enfants français, partout dans le monde, de poursuivre une éducation française de qualité, fidèle à nos valeurs républicaines. Ce dispositif a une double fonction : favoriser la mixité sociale au sein de notre réseau, qui rassemble aujourd’hui plus de 540 établissements et près de 370 000 élèves mais aussi préparer notre influence de demain. L’efficacité de cette double fonction mériterait d’être interrogée. 

Mais je voudrais en venir aux questions légitimes que ce système suscite. 

D’abord, sur le montant des bourses. On entend parfois qu’il serait insuffisant. Pourtant, le budget prévu pour ces bourses en 2024 n’a pas été entièrement utilisé. Cela traduit un recul du nombre de bénéficiaires, sans doute lié à l’évolution du profil de nos compatriotes à l’étranger. Il faut aussi reconnaitre que l’école locale peut apparaître comme une alternative plus cohérente, plus adaptée à la vie durablement installée hors de France qu’une école française, je pense à la Finlande ou à la Nouvelle Zélande, 2 pays dont la qualité et l’accessibilité du système local sont indiscutables. 

Ensuite, la question de l’équité. Trop souvent, on m’a signalé des situations inacceptables : · des familles aisées qui obtiennent des bourses grâce à des montages administratifs, · des entreprises qui intègrent ces aides dans leurs politiques salariales, · des salariés qui acceptent des rémunérations inadaptées, misant sur ces aides publiques pour boucler leur budget. Des salariés qui négocient un salaire local ou qui adaptent leur revenu d’indépendant pour obtenir une aide Des établissements qui construisent leur budget en quasiment fixant par avance le montant d’aide requis, montant qui ne bouge pas année après année, peu importe que le profil des familles ait changé ou pas. Je le dis avec beaucoup de gravité : c’est un détournement de l’esprit de solidarité nationale. Je crois que nous devons réserver prioritairement ces bourses aux seules familles dont la situation sociale les rendrait éligibles à des aides similaires en France. C’est une question de justice. 

Autre enjeu : le plafond des bourses. Il est difficilement compréhensible que l’enveloppe globale soit absorbée en priorité par quelques établissements pratiquant des frais de scolarité très élevés. Cela mérite un débat. 

La transparence, enfin, doit progresser. Beaucoup de parents, mais également vous, élus consulaires, jugent le système opaque, avec des critères d’attribution peu lisibles et des décisions parfois ressenties comme arbitraires. Cela alimente la défiance et fragilise l’adhésion au dispositif. En parallèle, il est indispensable d’adapter et de simplifier notre système. Nous devons alléger les démarches administratives dans un cadre clair, transparent et compris par tous. 

C’est pourquoi je souhaite proposer trois orientations : 

1. Mieux associer les Conseils consulaires aux décisions. Nos élus des Français de l’étranger connaissent la réalité du terrain, peuvent se faire le relais de la voix des familles ; leur rôle consultatif doit être renforcé dans l’élaboration et le suivi des critères d’attribution. 

2. Renforcer la transparence : simplifier les critères, les mettre en cohérence à l’échelle du réseau, publier systématiquement des rapports publics sur les critères, les montants distribués et leur répartition, pour prévenir tout soupçon de favoritisme et restaurer la confiance. 

3. Simplifier et moderniser les démarches, en développant des outils numériques accessibles et en harmonisant les procédures. Aujourd’hui, trop de complexité prive les plus fragiles de ce soutien. Je souligne que le nouveau logiciel Scolaid a fait une entrée en scène fracassante au sens propre du terme. Quel gâchis ! 

En définitive, je crois profondément que nous pouvons préserver ce dispositif, mais en l’ajustant, en redéfinissant ses objectifs, pour in fine le rendre plus juste, plus lisible et plus ciblé, en cohérence avec nos valeurs républicaines, en cohérence avec les pratiques d’aide sociale sur le territoire national. 

La crédibilité de l’action publique et la cohésion de nos communautés françaises à l’étranger en dépendent. 

 Je vous remercie de votre attention.