Sous ses allures ludiques de mode à bas prix, la plateforme SHEIN se retrouve aujourd’hui au cœur d’un scandale politico-judiciaire sans précédent. Loin de se limiter aux questions environnementales ou de consommation, le débat a basculé dans une tout autre dimension : celle de l’illégalité manifeste. Face à ce que certains appellent désormais le "fast-crime", le Gouvernement a agi avec détermination.
Du greenwashing à la vente illégale : une bascule inquiétante
SHEIN n’est pas qu’un symbole de la fast-fashion mondialisée : c’est aussi, depuis quelques semaines, le point de départ d’une onde de choc politique. À l’origine de l’affaire : des signalements très graves transmis à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Parmi les produits en cause, des poupées à caractère pédopornographique et des armes de catégorie A vendues librement via la marketplace du site. Une réalité sidérante qui révèle à quel point certaines plateformes opèrent en toute impunité, au mépris des lois françaises. Face à cette dérive, nous avons été nombreux, parlementaires, à hausser le ton. Aux côtés de ma collègue Sandrine Le Feur, j’ai cosigné une tribune pour alerter l’opinion publique et exiger que l’État fasse respecter la loi. Car derrière le « look à 5 euros », c’est notre souveraineté numérique, nos normes de sécurité, notre modèle de consommation durable qui sont bafoués.
L’État face au "Far West numérique"
Le Gouvernement français, sous l’impulsion du Premier ministre, a engagé une série de mesures fermes et inédites :
- - Procédure de suspension de la plateforme SHEIN.fr, fondée sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), en raison du caractère répété des infractions. Cette démarche pourrait aboutir à un blocage par les fournisseurs d’accès à Internet.
- - Injonction de mise en conformité émise par la DGCCRF, assortie de sanctions potentielles si SHEIN ne se plie pas aux règles françaises.
- - Contrôles douaniers renforcés à l’aéroport de Roissy, en collaboration avec la DGCCRF, pour vérifier la conformité des colis expédiés depuis la plateforme.
- - Saisine officielle de la Commission européenne, notamment sur la base du Règlement sur les services numériques (Digital Services Act - DSA), qui impose aux grandes plateformes des obligations strictes en matière de sécurité et de modération des contenus.
Sous pression, SHEIN a annoncé la suspension temporaire de sa marketplace, c’est-à-dire de l’espace où des vendeurs tiers peuvent commercialiser leurs produits. C’est un premier recul face à l’action publique. Mais cela ne saurait suffire : les enquêtes pénales se poursuivent et la vigilance demeure de mise. Au niveau européen, une coordination est en place entre États membres. Le DSA (Digital Services Act) prévoit en cas de récidive des amendes pouvant atteindre 6 % du chiffre d’affaires mondial des plateformes fautives. Ce bras de fer incarne une conviction forte : la loi française ne s’arrête pas aux portes du numérique.
En tant que députée, je continuerai à me mobiliser pour que la régulation des géants du e-commerce ne soit plus l’exception, mais la règle.