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À votre rencontre à Moscou

23 janvier, 2018

C’est à Moscou en Russie que j’ai effectué mon avant-dernier déplacement de l’année 2017 du 11 au 14 décembre précisément.  

Une communauté entreprenante 

La communauté française y est relativement importante avec 2700 inscrits au registre consulaire de Moscou pour environ 5500 Français dans l’ensemble du pays. Il faut souligner ici que la mobilité française vers la Russie est plutôt en baisse, en lien direct avec l’actualité du pays: économie en berne, sanctions occidentales et image dégradée.  

Lors de cette première visite, la communauté de Moscou m’a clairement témoigné de son attachement aux liens indéfectibles entre nos deux pays mais a également exprimé son souhait que la méfiance voire parfois la défiance française à l’égard de la Russie laisse place à la confiance. Pour ces Français dont la plupart sont installés de longue date là-bas, qui y ont établi des liens solides, souvent familiaux, qui ont une parfaite connaissance des qualités et défauts du pays, l’hostilité ressentie vis-à-vis de la Russie est pesante et incompréhensible. 

 Un partenaire incontournable 

Pourtant, ce pays est un partenaire historique essentiel notamment sur le plan économique et cela en dépit des difficultés actuelles liées à la récession russe et à la crise ukrainienne. À cet égard, la visite de Bruno Le Maire du 19 au 20 décembre derniers avait pour objet de renforcer nos relations économiques. Notre ministre de l’Économie a ainsi souligné : « Nous sommes convaincus que l’économie ne doit pas être otage des problèmes politiques », affirmant vouloir « aller de l’avant » et soulignant la « nouvelle impulsion » donnée aux relations franco-russes avec la visite de Vladimir Poutine à Versailles en mai dernier. Il m’a d’ailleurs été confirmé que les liens tissés par les communautés d’affaires étaient très forts.  Sur cet aspect, je retiens deux points :   

  • Un contexte de reprise économique russe qu’il serait opportun que la France puisse saisir; 
  • La volonté des autorités russes de sécuriser les activités des entreprises étrangères: mise en place de procédures claires, accessibles via les consulats, de lutte contre la corruption. 

Et deux remarques: 

  • Les sanctions occidentales ont des effets contre-productifs : les Russes les ont contournées en développant leur propre savoir-faire. Ce sont autant de marchés définitivement perdus pour l’UE.  
  • Le financement de certains projets franco-russes qui est difficile du fait des sanctions: prendre garde à la spirale négative dont les Chinois sortent bénéficiaires. 

Une école française dynamique et attachante  

Le second sujet important est celui de l’éducation. Il y a d’une part la situation de l’Agence pour l’Enseignement  Français à l’Étranger (AEFE) qui fera l’objet d’un rapport parlementaire courant 2018 (du moins tous les députés des Français établis à l’étranger de la majorité l’appellent de leurs vœux!) et qui nécessitera – très probablement – une réforme. Et puis, il y a les problématiques locales comme celle du lycée français de Moscou et ses 1325 élèves répartis sur plusieurs sites ce qui complique considérablement sa gestion au quotidien. Voici quatre points qui m’apparaissent importants :  

  • Une excellente ambiance pédagogique avec beaucoup de projets auxquels les élèves sont directement associés. Ce sont autant d’initiatives citoyennes fédératrices, ciment d’une communauté et vecteurs de convivialité. J’ai été profondément impressionnée par le dynamisme et l’implication innovante des lycéens ; 
  • La lourde charge de la contribution financière demandée aux parents. L’idée d’aller chercher des mécénats d’entreprises pourrait être explorée mais cela ne peut suffire: de nombreuses familles vivent en Russie indépendamment de toute entreprise française implantée sur place ; 
  • La spécificité du site de Saint Pétersbourg qui a ses propres besoins, est de petite taille sans perspective de croissance et pour lequel la question de sa pérenisation se pose ;  
  • Les difficultés de recrutement local d’enseignants : le vivier de personnes francophones aptes à enseigner dans un cadre français est très restreint et tant à se vider tant la délivrance du visa de travail devient un obstacle non négligeable à prendre en compte.   

 Un softpower français qui appelle à être renforcé 

Enfin, le troisième dossier qui a attiré toute mon attention est celui de l’influence française en Russie au travers notamment de la coopération scientifique et culturelle. Nous avons des progrès à accomplir dans ces différents domaines. Je le redis ici, je veux promouvoir toutes les initiatives en matière de coopération. Que ce soit sur un plan économique, scientifique, culturel ou artistique, la circulation des personnes et des idées, qui fonctionne dans les deux sens, enrichit tous ses acteurs. Cette mobilité internationale est aussi le meilleur moyen d’installer et de faire vivre notre softpower et de promouvoir la France et notre savoir-faire à travers le monde. C’est la condition du progrès par la confrontation des modèles et des expériences.   

La politique française de coopération en Russie emprunte plusieurs axes :  

  • les échanges, qu’il s’agisse des étudiants (mobilité favorisée par une active politique de bourses : la France est la 3ème destination des étudiants russes), des chercheurs ou plus généralement le dialogue avec les élites et avec la société civile ;  
  • la promotion de l’attractivité de la France, qui passe par une extension des actions dans les régions ; la coopération universitaire et scientifique avec la mise en place de doubles diplômes (plus de 230) ;  
  • l’appui apporté aux réformes en Russie, en particulier dans l’administration (échanges sur la justice des mineurs, les partenariats public-privé, les transports urbains, le développement régional, le soutien aux PME).  

Une attractivité bilatérale à développer 

Les liens entre nos deux pays se créent aussi par l’apprentissage réciproque de la langue: apprendre le russe en France et apprendre le français en Russie. Hélas, le compte n’y est pas:  notre langue, qui a pourtant été la langue des élites russes, est en nette perte de vitesse en Russie avec une faible 3e place de langue étrangère enseignée après l’anglais et l’allemand. Et la langue Russe pour sa part n’attire plus autant qu’il y a 40 ans dans nos écoles. Si l’on ajoute à cela le fait que les échanges universitaires sont difficiles (problèmes d’équivalence de diplômes et absence de système LMD en Russie) alors on comprend pourquoi et comment peu à peu se créé une perte d’apétance de l’un pour l’autre avec seulement 1000 visas délivrés chaque année à des étudiants russes pour venir en France (soit 1 sur 300 étudiants étrangers en France ou 0,3% – Données Campus France Juin 2017) et guère mieux de notre côté avec moins de 1% de jeunes Français parmi les étudiants étrangers en Russie. Il est clair que notre politique d’attribution de bourses manque cruellement d’ambition et n’est pas toujours en phase avec les objectifs affichés d’attractivité de la France. Un premier pas serait d’affecter un conseiller scientifique dans notre ambassade à Moscou.  

D’autres pistes de coopération ont été évoquées comme le développement de partenariats entre incubateurs d’entreprises.  

Des liens à recréer 

À mon retour en France, j’ai l’intention de porter un message clair : la Russie porte en elle les atouts d’un partenaire important pour notre pays, il nous faut renouer des liens, nous redécouvrir, nous faire à nouveau confiance. Toutes les formes de coopération seront à envisager: économique, culturelle et scientifique. Des divergences politiques existent bien sûr mais des convergences existent aussi:  nos intérêts communs et notre amitié doivent prendre l’ascendant! Forte d’une communauté bien implantée et fidèle, la France a une part à prendre dans la reprise économique en Russie.  

Un grand merci à tous! 

Pour conclure, je tiens à remercier toute la communauté française pour son accueil, en particulier Mme Sylvie BERMANN, ambassadeur de France en Russie, M. Marc SEDILLE, consul, M. Nicolas JORDA, vice-consul, chef de chancellerie, les conseillers consulaires M. Cédric ETLICHER, M. Nicolas MEGRELIS, les conseillers du commerce extérieur de la France, les membres du conseil d’administration de la Chambre de Commerce et d’Industrie Franco-Russe, les Présidents de l’UFE, de l’ADFE – Français du Monde, et de Moskva Accueil, l’APENG (association des parents d’élèves du Lycée Français Alexandre Dumas) et aussi tous ceux que j’ai rencontrés lors de ma permanence, les personnels et élèves du Lycée français…  

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