Chers compatriotes,
Le Conseil scientifique pour le suivi de la pandémie de Covid-19 à Singapour s’est tenu par visioconférence le mercredi 27 mai 2020.
Le Conseil est composé des médecins, chercheurs et spécialistes des maladies infectieuses exerçant à Singapour et dans la région, mentionnés ci-dessous :
- Sylvie Alonso, NUS (excusée)
- Sophie Bellanger, A*STAR
- Isabelle Bonne, NUS
- Patrick Cozzone, A*STAR
- Charles-Antoine Dutertre, A*STAR (excusé)
- Clotilde El Guerche Seblain, Sanofi-Pasteur (excusée)
- Arnaud Favry, Biomérieux
- Florent Ginhoux, A*STAR
- Dan Milea, SingHealth – Duke NUS Medical School
- Kevin Pethe, NTU (excusé)
- Guillaume Pollet, International SOS
- Laurent Renia, A*STAR
- Caroline Sevoz-Couche, Inserm / NUS
- Michael Shleifer, SPRIM-Venture (excusé)
- Taraneh Shojaei, Conseillère régionale en santé mondiale, Ambassade de France à Bangkok
- Anne-Claire Stona, NTU
- Sébastien Teissier, A*STAR
- Jean-Paul Toutain, CNRS
Deux représentants du Comité Analyse, Recherche et Expertise (CARE), mis en place le 24 mars dernier auprès du ministre des Solidarités et de la Santé ainsi que de la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, ont participé à cette réunion :
- Franck Molina, directeur de recherche au CNRS, spécialiste des technologies de diagnostic et des anticorps monoclonaux, directeur de l’unité mixte de recherche Sys2Diag à Montpellier (CNRS – Alcediag) ;
- Sylviane Muller, directrice de recherche au CNRS, immunologiste, directrice du Labex Medalis à Strasbourg et titulaire de la chaire d’immunologie thérapeutique à l’USIAS (Institut d’études avancée de l’Université de Strasbourg).
Présidé par Mme Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de médecine en 2008, le CARE est chargé d’éclairer les pouvoirs publics français sur les innovations scientifiques, thérapeutiques et technologiques proposées par la communauté scientifique pour lutter contre le Covid-19 (développement et déploiement de traitements de tests et d’essais, avec un accent particulier sur les expériences conduites à l’étranger).
Cette réunion élargie a commencé par un point sur la situation à Singapour. La cité-État présente toujours deux situations épidémiologiques distinctes : l’une touchant la population de travailleurs immigrés vivant dans des dortoirs, et l’autre touchant plus spécifiquement la communauté nationale et expatriée. Dans les deux cas, on observe une stabilisation de l’épidémie (environ 500 cas par jour, dont moins de 10 au sein de la communauté). Le nombre de cas non reliés est désormais de deux unités par jour maximum et le nombre de patients en réanimation est maintenant inférieur à dix. Une étude de la National University of Singapore indique qu’à l’horizon de trois à quatre semaines le nombre de cas quotidiens issus des dortoirs devrait descendre sous la barre des 100. À ce jour, environ 8 000 tests sont effectués quotidiennement sur l’ensemble de la population. Les autorités singapouriennes ont pour objectif de monter à 40 000 tests par jour d’ici à la fin du mois de juin avec la mise en service imminente du centre de tests Stronghold sur le campus de Biopolis d’A*STAR. Dans la perspective de la levée des restrictions liées au circuit breaker, une campagne de tests systématique a été réalisée sur les personnels travaillant dans les écoles maternelles et les maisons de retraite. Quelques cas ont été détectés au cours de cette campagne, dont certains n’étaient reliés à aucun foyer de contamination connu. Enfin, l’ouverture d’un centre de tests au sein de l’aéroport Changi, dans la perspective de la montée en puissance des vols internationaux, est actuellement en discussion.
Le Conseil scientifique et les membres invités du CARE ont poursuivi leurs discussions sur l’état d’avancement des recherches en termes de tests et traitements en France et à Singapour. Au début de l’épidémie, la France a connu une pénurie de tests Covid-19, ce qui a poussé notre pays à se doter d’une quarantaine de plateformes chinoises de tests permettant également de sécuriser l’approvisionnement des composants. Lourdes à mettre en place, ces plateformes continuent à monter en puissance et permettront d’effectuer 700 000 tests par semaine.
Le CARE privilégie un système de tests à plusieurs étages opérationnels. En effet, la mise en place de tests de terrain, de bonne performance et plus souples à utiliser que les tests PCR et sérologiques, apparaît complémentaire pour accompagner l’augmentation des capacités de dépistage. À ce titre, le CNRS a lancé une étude clinique à Montpellier visant à développer un test salivaire aux performances comparables à celles des tests effectués en laboratoire. Ce test, après validation par les autorités compétentes, pourrait être utilisé, dès la mi-juin, dans les aéroports, les gares et autres lieux fermés accueillant du public.
Par ailleurs, la France a développé une méthode de dosage dans les eaux usées du matériel génétique du SARS-CoV-2 (ARN) dont le taux semble suivre la courbe des infections. Cette corrélation est particulièrement intéressante du point de vue du suivi de la maladie car elle pourrait permettre de développer à l’avenir un système d’alerte épidémique avancé à l’échelle du territoire.
Le Conseil scientifique a poursuivi ses discussions sur le développement de traitements. L’utilisation de la chloroquine et de l’hydroxychloroquine en France a connu un coup d’arrêt à la suite notamment de la publication d’une étude démontrant son inefficacité dans la revue médicale The Lancet. Paradoxalement, la poursuite des essais thérapeutiques se complique en France comme à Singapour du fait du ralentissement de l’épidémie dans nos deux pays et de la diminution du nombre de patients. Il a été évoqué la mise en place d’essais miroirs entre nos deux pays afin notamment de tenir compte de la variabilité du virus. Par ailleurs, la dépendance des pays européens vis-à-vis de pays comme la Chine ou l’Inde pour la fourniture de traitements pose la question de la mise en place d’une autonomie européenne sur les stocks de médicaments et les matières premières nécessaires à leur fabrication.
Enfin, le Conseil scientifique a terminé sa sixième réunion par un point de situation dans neuf pays d’Asie du Sud-Est (Birmanie, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Thaïlande, Timor-Oriental, Vietnam). La plupart des pays semble avoir réussi à contrôler l’épidémie, qui montre au moins quatre visages dans la région.
L’épidémie n’a réellement pas décollé dans les pays du Grand Mékong (Birmanie, Cambodge, Laos, Vietnam) et au Timor-Oriental. Elle a connu dans d’autres pays une forte accélération avant d’être maitrisée, notamment grâce à des mesures préventives (Malaisie, Thaïlande). Elle montre une courbe ayant du mal à redescendre témoignant de la stabilité dans le nombre de nouveaux cas aux Philippines (en moyenne entre 200 et 250 nouveaux cas par jour ces dernières semaines). Enfin, l’épidémie montre une courbe ascendante, à l’heure actuelle, en Indonésie.
La situation épidémiologique tend à refléter la réaction de chaque pays face à l’épidémie. Les États ont géré « la situation » de manière plus ou moins rapide, plus ou moins cohérente : très rapide pour le Vietnam ; rapide pour les Philippines ; hésitante pour la Thaïlande, la Malaisie ou l’Indonésie ; lente pour le Cambodge ; et très lente pour le Laos, la Birmanie et le Timor-Oriental qui n’ont déclaré leur premier cas de Covid-19 qu’entre le 21 et le 24 mars.
Plus généralement, on constate des ressemblances et des facteurs de succès dans les pays qui sont :
- la création d’un état-major pour lutter contre le virus,
- une communication maîtrisée des risques liés à l’épidémie,
- l’adoption rapide de la doctrine de quatorzaine.
Selon les données de l’OMS, le niveau de vulnérabilité aux maladies infectieuses et la capacité de réponse dans le contexte de la crise au Covid-19 varie considérablement d’un pays à l’autre. On y distingue trois catégories de pays : (I) quatre pays « vulnérables ayant des faibles capacités » (la Birmanie, le Cambodge, le Laos et le Timor Oriental) ; (II) trois pays « moyennement vulnérables ayant des capacités intermédiaires » (l’Indonésie, les Philippines et le Vietnam) ; et (III) deux pays « peu vulnérables ayant des bonnes capacités » (la Malaisie et la Thaïlande). Les systèmes de santé, notamment ceux du groupe I et II, se sont vus confrontés à une crise inédite testant leur robustesse et leur résilience, notamment en ce qui concerne :
- leurs capacités de tests au Covid-19,
- la formation des professionnels de santé dans un contexte général d’insuffisance.
Depuis le début de la crise, les pays asiatiques ont subi, comme le reste du monde, la pénurie mondiale et l’augmentation des prix des médicaments et du matériel liés au Covid-19 (les antiviraux, certains antibiotiques, les kits de tests diagnostiques, les réactifs de laboratoire et les équipements de protection individuel).
Enfin, même si la recherche sur les zoonoses, les dispositifs de détection et de prévention, les traitements ou les vaccins contre le Covid-19, suscitent un grand intérêt des partenaires locaux, ce secteur souffre du manque d’expertise et de ressources.
Le Conseil scientifique se réunira de nouveau le 11 juin 2020, ou plus tôt en cas de nécessité.
Marc Abensour
Ambassadeur de France à Singapour
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