Le dossier du glyphosate suscite beaucoup d’interrogations voire d’incompréhensions. Celles-ci sont légitimes car il s’agit d’une problématique particulièrement sensible et complexe.
Une décision collective
La décision sur le glyphosate est une décision collective. C’est celle du Gouvernement et celle de notre groupe parlementaire. C’est dans ce contexte que j’ai donné délégation pour le vote du projet de loi dans son ensemble. Le règlement de l’Assemblée ne permet pas de donner délégation pour un vote sur un amendement. Ce texte a été voté par 295 députés de La République En Marche !. N’oublions pas l’essentiel, la loi EGALIM pour l’agriculture et l’alimentation apporte de nombreuses avancées pour aller progressivement vers une agriculture plus soutenable : en payant le juste prix aux producteurs, en interdisant les néonicotinoides, en luttant contre la maltraitance animale…
L’impératif écologique
Parmi les grands défis de notre génération, nous devons relever celui de la préservation et de l’amélioration de notre environnement. Vous le savez, nous avons déjà pris de nombreuses mesures dans ce sens. Il faut aller plus loin mais il faut aussi rester crédible. Nous vivons, espérons-le, la fin d’un modèle. Celui qui consistait à penser que nous pouvions utiliser les ressources naturelles sans limites. Nous avons besoin de passer d’un modèle de production intensive à un monde beaucoup plus sobre en énergie, en hydrocarbures, en pesticides etc. Notre modèle agricole en est un parfait exemple. Mais cette transformation ne se fera que si nous sommes capables de rassembler tous les acteurs vers ce même objectif. Aujourd’hui, il apparaît que la solution la plus efficace est d’accompagner nos agriculteurs vers de nouvelles pratiques sans les mettre au pied du mur en légiférant. C’est une stratégie de responsabilisation qui est, je crois, conforme avec les valeurs de la majorité présidentielle.
Mon combat pour l’intégrité scientifique
À l’Assemblée nationale, j’ai choisi de m’engager pour promouvoir l’intégrité scientifique avec l’OPECST (Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques). Dans ce cadre, une procédure est en cours, à la demande des commissions des affaires économiques et des affaires européennes, pour enquêter sur « l’indépendance et l’objectivité des agences européennes chargées d’évaluer la dangerosité des substances mises sur le marché, notamment le glyphosate ». Cela fait moins de bruit médiatique ; pourtant nous effectuons un travail extrêmement rigoureux. Aujourd’hui, la dangerosité du glyphosate fait débat au sein de la communauté scientifique. Il n’existe aucun consensus. À ce jour, seul le Centre international de recherche sur le cancer, qui dépend de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a classé en 2015 ce produit comme cancérogène probable, contre l’avis de toutes les agences sanitaires (en Europe et aux États-Unis) chargées de l’homologation des pesticides. Rappelons au passage que le caractère cancérogène supposé concerne l’exposition directe. Ce n’est pas le fait de manger un produit qui a poussé dans un champ traité qui pourrait poser problème. Rappelons aussi que l’OMS a classé la viande rouge comme cancérogène probable, exactement au même niveau que le glyphosate. Il faut donc comprendre cette qualification à la hauteur de ce qu’elle signifie. En l’attente des conclusions que nous publierons prochainement, il me paraît inopportun d’apporter un jugement définitif sur ce dossier.
Le principe de réalité
Dans la mesure où l’Union européenne a choisi de renouveler la licence du glyphosate pour 5 ans, l’interdire en France, c’est désavantager nos agriculteurs face à la concurrence européenne, déjà féroce, sans pour autant garantir aux consommateurs une alimentation sans glyphosate. La France importe beaucoup de produits agricoles. Deuxième point : pour des raisons liées au rendement, nos agriculteurs ne savent pas se passer des pesticides aujourd’hui. Suite à l’intention du Gouvernement d’interdire le glyphosate, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), organisme de référence, a rappelé dans un rapport de décembre 2017 : « il sera sûrement nécessaire, dans cette période de transition, d’utiliser d’autres herbicides homologués, mais qui peuvent avoir des profils toxicologiques plus défavorables que celui du glyphosate ». À ce jour, l’interdiction du glyphosate se confronte donc au principe de réalité. Légiférer aujourd’hui, c’est aller vers des solutions court termistes potentiellement dangereuses.
Vers une sortie progressive du Glyphosate
Il y a bien des années que des décisions auraient dû être prises : pour sortir d’un modèle agricole ultra intensif dépendant des pesticides (particulièrement du Round Up), pour éviter les situations quasi monopolistiques dans l’agrochimie et l’agroalimentaire. Cette situation, nous en héritons. Il nous faut maintenant la transformer de la manière la plus pragmatique possible. La décision qui a été prise par le Gouvernement et le groupe va dans ce sens. Comme l’a rappelé Brune Poirson, Secrétaire d’État à la Transition écologique et solidaire, c’est notre mouvement qui a ouvert le débat en France et en Europe.
Enfin, vous devez savoir que toute une série de mesures, dont la création d’un groupe d’étude parlementaire, sont prévues pour s’assurer du respect de la parole présidentielle et aller vers une sortie progressive de l’utilisation du glyphosate.